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Bonne ou mauvaise foi ?

Lorsqu’un Tribunal invalide la vente d’un véhicule pour vices cachés mais que le vendeur est reconnu de bonne foi, c’est-à-dire qu’il est établi qu’il ignorait l’existence du défaut grave affectant le véhicule, il ne sera tenu que de restituer le prix à acheteur ainsi que les frais occasionnés par la vente, notamment les frais de transfert de la carte grise.

Le vendeur de bonne foi ne sera donc pas condamné à rembourser à l’acheteur le coût des éventuelles réparations que ce dernier aurait pu faire effectuer sur le véhicule, pour tenter par exemple de remédier au défaut découvert (1).

En revanche, aux termes de l’article 1645 du Code civil, “si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre les restitution du prix qu’il a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.”

La preuve de la mauvaise foi

Lorsque le vendeur est un professionnel, l’acheteur est purement et simplement dispensé de prouver la mauvaise foi : le vendeur professionnel est toujours considéré comme étant de mauvaise foi puisqu’il est juridiquement tenu de connaître les vices pouvant affecter le véhicule vendu, même s’il ne les avait concrètement pas décelés.

En revanche, il reviendra à l’acheteur la charge de démontrer la mauvaise foi du vendeur lorsque ce dernier est un non professionnel s’il entend obtenir des dommages et intérêts, en plus de la restitution du prix de vente.

Les indices retenus

Quels sont donc les indices sur lesquels se fondent les Tribunaux pour considérer que le vendeur était de mauvaise foi ?

Très souvent, l’indice majeur est la rapidité avec laquelle le vendeur a revendu le véhicule : s’il n’est resté propriétaire que très peu de temps, et sauf s’il donne une explication convainquante pour une revente très rapide, il y de bonnes chances pour que cela provienne du fait qu’il avait découvert le mauvais état de l’engin.

A titre d’illustration, il en a été jugé ainsi dans le cas d’un véhicule revendu 8 jours à peine après que le vendeur ait fait établir la carte grise à son nom et après qu’il l’ait présenté comme “tout reconditionné” dans l’annonce de vente alors que l’expertise avait révélé qu’il était en fait affecté de nombreux vices graves compromettant la sécurité de son utilisation (2).

Il a également été jugé que le vendeur était de mauvaise foi lors d’une revente seulement trois semaines après l’achat (3) et même trois mois après l’achat, compte tenu des circonstances (4).

La prise en charge des frais

Si la mauvaise foi du vendeur est établie, l’acheteur aura droit non seulement à la restitution du prix qu’il a payé mais également à l’indemnisation de toutes les conséquences dommageables engendrés pour lui par la résolution du contrat et notamment (5) :

frais et coût d’un éventuel crédit,
frais de remorquage et/ou de dépannage,
frais de retour du conducteur du lieu de l’accident ou de la panne jusqu’à son domicile,
frais d’immobilisation du véhicule,
frais d’expertise privée,
frais de remise en état engagés à pure perte sur le véhicule.
Enfin, il est important de préciser que les conséquences dommageables visées à l’article 1645 du Code Civil incluent également les éventuels dommages corporels que le véhicule aurait pu causer à son conducteur ou même à des tiers lors d’un accident résultant d’un vice caché.

Le jeu de la garantie des vices cachés tient compte de la profession des parties à la vente. Qu’en est-il lorsque l’acheteur est un professionnel ?

Absence de garantie

Contrairement à l’acheteur occasionnel ou profane, l’acheteur professionnel est présumé connaître les défauts de l’automobile qu’il achète, par exemple dans le cadre d’une “reprise”.

La conséquence est importante puisque lorsqu’un acheteur est reconnu comme “professionnel”, il se voit en principe privé de tout recours en garantie pour vices cachés : il ne pourra donc pas obtenir la résolution de la vente pour ce motif.

La qualité d’acheteur professionnel “transforme” ainsi, en quelque sorte, les vices cachés en vices apparents dont l’acheteur n’est pas en droit de se plaindre.

Les raisons de cette sévérité sont aisées à comprendre : on considère qu’un professionnel, à la différence d’un non professionnel, dispose des compétences techniques lui permettant de procéder aux contrôles utiles pour détecter les anomalies.

Ceci dit, reste cependant à préciser ce qu’il faut entendre par professionnel. S’agit-il exclusivement des professionnels de l’automobile, voire de la réparation automobile ? Bref, est-ce que seuls sont privés du recours les mécaniciens patentés, en raison de leurs connaissances en mécanique ?

Qui est acheteur professionnel ?

Il faut savoir que les Tribunaux optent pour une définition très large de l’acheteur professionnel, appréciée néanmoins au cas par cas en fonction des qualifications professionnelles précises de chacun.

Ainsi, la qualité d’acheteur professionnel a-t-elle été reconnue notamment à un transporteur routier (1), un représentant de commerce dans le secteur de l’automobile (2) ou à un ajusteur (3).

Au contraire, n’ont pas été considérés comme acheteurs professionnels, un entrepreneur de travaux publics lors de l’achat d’un engin de chantier (4) ou encore un gérant de station service lorsqu’il se rend acquéreur d’une voiture de tourisme, car ce dernier n’avait pas reçu de formation en mécanique mais en installation de sanitaires (5)….

Le vice indécelable

On se trouve parfois devant cette contradiction qu’un acheteur peut disposer des connaissances lui permettant de juger de l’état d’une automobile mais sans que cela puisse exclure d’importantes erreurs d’appréciation de sa part.

Et c’est pour tenir compte de ce cas de figure que dans sa jurisprudence la plus récente, la Cour de cassation a reconnu à l’acheteur professionnel ou à l’acheteur reconnu comme tel le droit de se prévaloir de vices cachés pour obtenir la résolution d’une vente dès lors qu’il est établi qu’il n’avait pas vu les défauts parce qu’ils étaient difficilement perceptibles sans démontage (6).

Cette solution paraît extrêmement raisonnable puisqu’elle tient compte d’une réalité technique difficilement contestable, à savoir que certains vices peuvent échapper même à la vigilance d’un acheteur professionnel : on parle en la matière de “vices indécelables”, c’est à dire de vices indécelables sans démontage (7).

Dans cette même logique, il convient encore de préciser que lorsque le vendeur est de mauvaise foi, qu’il s’est rendu coupable de ruses pour tromper l’acheteur sur l’état du véhicule vendu (maquillage de défauts), peu importe que ce dernier soit un acheteur professionnel ou non : les Tribunaux considèrent en effet dans cette hypothèse que l’acheteur professionnel retrouve la possibilité de se prévaloir des vices cachés puisque ses facultés d’appréciation ont été délibérément mises en échec par une manoeuvre frauduleuse du vendeur.

Les professionnels sont donc également protégés contre les éventuels stratagèmes de vendeurs peu scrupuleux.

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(1) Cass. com. 5 octobre 1965, Bull. IV n° 481 –
(2) Cass. com. 3 juin 1982, Jurisp. Auto 1983 p. 60 –
(3) TI Bordeaux, 7 avril 1987, Jurisp. auto. 1987, p.77 –
(4) Cass.1ère civ. 20 décembre 1983, Bull. I n°308 –
(5) CA Bordeaux 15 janvier 1986, Jurisp. auto. 1986 p.387 –
(6) Cass. 1ère civ., 21 février 1989, Jurisp. auto. 1989, p.171 –
(7) Cass. com., 15 novembre 1983, Bull.IV n°311

Les compteurs kilométriques, qu’ils soient mécanique ou digital, peuvent être “remis à l’heure” par des entreprises européennes ayant pignon sur rue. Quel risque encoure l’automobiliste ou le professionnel qui a recourt à de telles pratiques ?

Ce type de pratique est formellement prohibé par les dispositions de l’article 3 du Décret n° 78-993 du 4 octobre 1978 qui dispose :

“Il est interdit de modifier le kilométrage inscrit au compteur d’un véhicule automobile ou de le ramener au chiffre zéro.

En cas de changement de compteur, le kilométrage inscrit sur l’ancien appareil doit être reporté sur le nouveau, à la diligence de la personne effectuant le changement”.

Sur le plan pénal, ce type de pratique peut être puni par le délit de tromperie prévu et réprimé par l’article L 213-1 du Code de la Consommation qui prévoit que sera puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 37.500 euros ou de l’une de ces deux peines seulement quiconque, qu’il soit ou non partie au contrat, aura trompé ou tenté de tromper le contractant, par quelque moyen ou procédé que ce soit, même par l’intermédiaire d’un tiers, sur la nature, l’espèce, l’origine, les qualités substantielles, la composition ou la teneur en principes utiles de toutes marchandises.

Les Tribunaux condamnent ainsi, en application de ce texte, les modifications frauduleuses des compteurs kilométriques pour tromperie sur une qualité substantielle.

Par ailleurs, sur le plan civil, les tribunaux sanctionnent le vendeur d’un véhicule dont le compteur a été modifié soit par la résolution du contrat soit par sa nullité, ce qui emporte des conséquences identiques.

En outre, si le vendeur est reconnu de mauvaise foi, c’est-à-dire qu’il est établi qu’il connaissait l’existence de la manipulation du compteur, il peut en outre être condamné à des dommages et intérêts (frais, privation de jouissance de l’acheteur, frais que ce dernier aura exposés sur le véhicule…).

L’acte de cession permet à un vendeur d’écrire “XXX km au compteur non garanti”, en d’autres mots, le vendeur ayant fait trafiquer son compteur dégage-t’il sa responsabilité en ne garantissant pas le kilométrage de son véhicule ?

Certainement pas, il reste en tout état de cause garant des caractéristiques du véhicule qu’il vend, quand bien même il ignorait totalement l’existence de la manipulation opérée sur le compteur de son véhicule.

La Cour de Cassation a d’ailleurs eu très récemment l’occasion de rappeler ce principe (1ère Chambre Civile – 12 juillet 2005) jugeant que le vendeur qui remettait à son acheteur un véhicule dont le kilométrage était supérieur à celui annoncé inexécutait son obligation de délivrance d’un véhicule conforme aux prévisions des parties.

La résolution de la vente est donc encourue, y compris dans ce cas de figure.
Que dois-je faire lorsque, n’étant pas capable de garantir mon kilométrage réel lors d’une vente d’un véhicule qui a eu plusieurs propriétaires, je n’ai d’autre solution que de marquer XX km au compteur non garanti. Faut-il faire signer un papier à l’acheteur qui déclare avoir été informé sur un kilométrage réel ou sur l’impossibilité de le fournir ?

La remise par l’acheteur d’une attestation par laquelle il reconnaîtrait avoir été informé sur l’incertitude du kilométrage du véhicule pourrait, dans certaines circonstances, exonérer la responsabilité du vendeur.

Cela supposerait cependant que ce dernier n’ait pas agi de mauvaise foi c’est-à-dire en sachant pertinemment que le véhicule a fait l’objet d’une modification de son compteur kilométrique.

Les tribunaux considèrent en effet que toutes clauses d’exclusion ou limitation de responsabilité ne sont valables qu’en l’absence de mauvaise foi de celui au profit duquel elles sont stipulées.

Faisant écho à la situation de l’acheteur professionnel face à la garantie des vices cachés, le vendeur professionnel est lui aussi traité avec plus de sévérité que le vendeur occasionnel. Comment ?

Une sévérité croissante

Force est de constater qu’au cours des années, le statut juridique du vendeur professionnel d’automobiles est devenu de plus en plus rigoureux.

Dans un premier temps, si les Tribunaux considéraient que le vendeur professionnel était présumé de mauvaise foi, ils lui accordaient néanmoins la faculté de démontrer le contraire en prouvant qu’il ignorait concrètement les vices cachés du véhicule vendu, même s’il était techniquement en mesure de les découvrir (par exemple, parce qu’avant de le revendre, le véhicule lui avait paru d’excellente présentation et fonctionnait parfaitement et qu’il n’avait donc pas jugé utile de procéder à un examen approndi).

Il est aujourd’hui clairement affirmé que le vendeur professionnel reste toujours présumé de mauvaise foi, sans possibilité pour lui de démontrer le contraire, qu’il ait ou non procédé à un examen approndi lui ayant permis de découvrir les défauts en cause.

Juridiquement, on considère que le vendeur professionnel est donc tenu de connaître les défauts de l’automobile qu’il vend (1), ce qui l’oblige à payer des dommages et intérêts à l’acheteur lorsqu’un Tribunal prononce la résolution de la vente pour vices cachés.

Le mécanicien amateur

De la même manière, le simple particulier qui indique lors de la vente qu’il a procédé lui-même à des réparations sur le véhicule vendu reconnaît ainsi qu’il dispose de compétences en mécanique.

Cela conduit parfois les Tribunaux à considérer qu’un tel vendeur est de mauvaise foi, qu’il connaissait ou aurait dû connaître les défauts du véhicule comme s’il était un véritable vendeur professionnel (2).

On notera également qu’un ingénieur employé chez un constructeur automobile, compte tenu de sa formation en mécanique, a été assimilé à un vendeur professionnel (3).

De même, la jurisprudence dominante a assimilé le chauffeur routier à un vendeur professionnel (4).

Dépôt-vente chez un professionnel

D’une manière générale, le sort du vendeur professionnel est encore plus rigoureux que celui de l’acheteur professionnel puisqu’il ne peut se réfugier derrière la notion de vice indécelable.

C’est pour cette raison que beaucoup de professionnels du commerce automobile ont cherché à contourner la difficulté en se présentant comme de simples intermédiaires entre l’acheteur et le véritable vendeur au sens juridique du terme, c’est-à-dire l’ancien propriétaire.

C’était, à l’origine, l’un des objectifs du système du dépôt-vente.

Mais la technique s’est révélée inefficace car les Tribunaux ont considéré que le professionnel du marché de l’occasion n’est pas un simple intermédiaire mais un véritable vendeur, avec les obligations qui y sont attachées et ce même s’il n’est pas juridiquement propriétaire du véhicule vendu (5).

En cas d’acquisition d’un véhicule dans le cadre d’un dépôt-vente, l’acheteur insatisfait qui entend se plaindre de vices cachés peut donc non seulement rechercher la responsabilité de l’ancien propriétaire du véhicule mais également celle du professionnel qui est intervenu comme intermédiaire dans la vente.

Force est d’y voir une nouvelle expression de la volonté des Tribunaux de protéger au maximum le consommateur lorsqu’ils estiment qu’il a été abusé.

Lorsque l’on étudie le recours en garantie sur le fondement des vices cachés, un constat s’impose rapidement : les principes de droit positif qui gouvernent la matière résultent très largement d’une construction jurisprudentielle autour des défaillances des véhicules automobiles .

Chronologiquement, si le contentieux du début du siècle était encore assez rare et plus marqué par des litiges portant sur les engins agricoles que sur les voitures particulières, alors accessibles pour un petit nombre seulement, la croissance rapide du parc automobile français dans l’après guerre a constitué un terreau fertile pour la jurisprudence.

De fait, certains principes parmi les plus importants de la matière sont issus des recours d’acquéreurs d’automobiles: citons à titre d’exemple l’arrêt Lamborghini, décision de principe pour le régime de l’action (action directe du sous-acquéreur contre le fabriquant) ou encore un arrêt par lequel la Cour de cassation a posé en 1973, à l’occasion d’un litige né de la vente d’un camion d’occasion, le principe de licéité des clauses restrictives de garantie dans les contrats entre professionnels de même spécialité .

Or, de façon assez paradoxale, non seulement les études sur les vices cachés dans les ventes d’automobiles sont peu nombreuses au regard du volume de contentieux existant mais la plupart d’entres elles sont en outre assez anciennes. Certes, cela ne préjudicie en rien à leur grande qualité et un hommage tout particulier doit être rendu à ce propos aux travaux de Monsieur Gérald LEVY publiés en 1970 à la Revue Trimestrielle de Droit Civil.

A la lueur d’un panorama de la jurisprudence récente intervenue en la matière, la présente contribution tentera donc d’apporter quelques éclairages complémentaires sur le recours en garantie des vices cachés lorsqu’ils affectent les automobiles.

Le cadre de nos développements sera néanmoins limité aux seules conditions de fond du recours, à l’exclusion de l’analyse des différents aspects de son régime, bien qu’il présente certainement quelques originalités en matière automobile : appréciation du bref délai de l’article 1648 du Code Civil, hiérarchie des actions estimatoire et redhibitoire en fonction de la gravité du vice, etc….

Après quelques brefs rappels très généraux (I), chacune des trois principales conditions du recours sera successivement envisagée (II).

I. Quelques rappels sur le domaine et les conditions du recours en garantie sur le fondement d’un vice caché

On sait que l’originalité essentielle de l’obligation légale de garantie des vices cachés prévue et organisée par notre Code civil, c’est qu’elle est due par tout vendeur d’une chose quelconque, sans que ce dernier n’ait eu à souscrire un engagement particulier, contrairement aux garanties dites “conventionnelles” ou “contractuelles”.

L’article 1641 du Code Civil, pierre angulaire du système, dispose :

“Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.”

Rappelons en premier lieu que la question de l’applicabilité de la garantie légale aux objets d’occasion fût autrefois controversée mais qu’il est aujourd’hui pleinement admis que cette catégorie d’objets entre dans son champ, y compris lorsque la vente intervient entre particuliers .

Or dans la pratique, c’est précisément le marché des véhicules d’occasion qui donne naissance au contentieux le plus volumineux, lequel sera en conséquence au centre de notre étude.

Schématiquement, pour que la défaillance d’une automobile soit reconnue de nature à légitimer soit une action en garantie en vue de la résolution de la vente (action rédhibitoire) ou en vue de la réduction du prix (action estimatoire) il faut démontrer la réunion de plusieurs conditions :

en premier lieu, qu’il s’agit d’un vice antérieur à la vente (1),
ensuite , qu’il s’agit d’un vice suffisamment grave pour qu’il rende le véhicule impropre à l’usage auquel il est destiné ou qui, comme le précise la loi, diminue tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquis s’il l’avait connu (2),
enfin, qu’il s’agit d’un vice occulte, l’acheteur n’en ayant pas été informé ou ne l’ayant pas découvert (3).
Qu’en est-il de chacune de ces conditions lorsque le recours intervient à la suite de la vente d’un véhicule automobile ?

II. Les conditions du recours

1. L’antériorité du vice à la vente

Bien que cette condition ne résulte pas d’une disposition expresse du Code Civil, la jurisprudence subordonne en premier lieu le recours de l’acheteur à la démonstration du fait que le vice affectant le véhicule existait au moins en germe à la date du contrat de vente .

Il est en effet parfaitement logique, et équitable, d’exclure de la responsabilité du vendeur les défauts entièrement nouveaux, même s’ils sont graves, pour autant qu’ils surviennent postérieurement au contrat du fait notamment de l’usure consécutive à l’utilisation du véhicule par l’acquéreur ou encore d’un défaut d’entretien qui lui serait imputable .

Comment l’antériorité du vice à la vente est-elle établie en matière automobile ?

a) L’expertise technique

Sur le plan de l’administration de la preuve, il reviendra le plus souvent à un expert de déterminer si le vice existait au jour de la vente, question de nature technique sur laquelle il n’est pas toujours aisé de se prononcer.

C’est notamment pour cette raison que l’article 1648 du Code Civil prescrit à l’acheteur d’introduire son recours à bref délai après avoir découvert le vice redhibitoire car plus il tarde à agir, plus cela compromet la possibilité de dater la naissance du vice par rapport au jour de la transaction.

Sur le plan technique, à l’exception des ruptures soudaines et brutales qui peuvent toujours survenir, le processus de dégradation des différents organes constitutifs d’un véhicule s’inscrit le plus souvent dans une certaine durée.

L’exemple type est la corrosion pour laquelle il est souvent possible, pour un technicien, non pas de dater très précisément son apparition mais plutôt de replacer ses effets dans une chronologie suffisante pour en tirer des conclusions de droit, en tenant compte par exemple de certains facteurs aggravants ou modérateurs.

Tel était le cas par exemple de la rupture d’une pièce à propos de laquelle l’expert avait pu établir qu’elle s’était amorcée avant la vente “car les lèvres de la cassure étaient rouillées” ce qui, bien que ne conférant évidemment pas date certaine à l’apparition du vice, permettait néanmoins une approximation suffisante pour déterminer si la condition d’antériorité était satisfaite.

Pour se prononcer, les experts peuvent d’ailleurs tenir compte de circonstances aussi variées que le lieu de stockage habituel ou même la localisation géographique du véhicule : en effet, la corrosion se développera significativement plus rapidement si le véhicule est exposé depuis longtemps aux intempéries parce qu’il est stationné à l’extérieur et/ou au bord de la mer que s’il est remisé dans un endroit couvert et climatisé.

Mais comme dans beaucoup d’autres domaines, les ressources de la science ne sont pas sans limites et quel que soit le degré de ses compétences, l’expert n’est pas toujours en mesure d’apporter aux magistrats saisis du litige une réponse catégorique sur le point de savoir si le défaut critiqué trouvait ou non son origine antérieurement au contrat de vente.

b) Le rôle des présomptions

Pour pallier les incertitudes qui pourraient demeurer, même après une expertise, les Tribunaux sont donc parfois conduits à faire jouer une présomption qui tient compte de l’importance de l’utilisation du véhicule et du lapse de temps qui s’est écoulé entre le jour de la vente et le jour où le vice caché s’est rélévé à l’acheteur.

Le principe en est très simple : plus l’utilisation du véhicule aura été importante depuis son acquisition – ce qui est une donnée facile à obtenir par la comparaison du kilométrage entre le jour de la vente et le jour de la découverte du vice – et la durée longue, moins l’on pourra considérer que le vice existait au moment de l’achat.

Il a ainsi été jugé, par exemple, que pour des désordres survenus plus de 6 mois après la vente et après 7300 km, il n’était pas démontré qu’ils existaient au jour de la vente , ou encore, lorsque un acquéreur avait pu parcourir près de 70.000 km sans incident depuis la vente .

De même, il a été décidé qu’au moment de la vente, un véhicule ne présentait pas de vice le rendant impropre à l’usage auquel il était destiné puisque l’acquéreur avait pu parcourir 3.900 km avant qu’une anomalie ne se manifeste au niveau de la boite de vitesses .

Il semble cependant que cette présomption joue davantage lorsque la juridiction saisie déboute l’acquéreur de son action en établissant négativement le défaut d’antériorité du vice que lorsqu’elle fait droit au recours.

Pour condamner le vendeur, les magistrats se montrent en effet souvent plus exigeants en requérant une preuve directe et positive de l’antériorité du vice, ce qui est d’ailleurs très légitime.

Si la preuve est insuffisante et qu’un doute subsiste, la condition d’antériorité ne sera pas jugée comme établie : tel était notamment le cas de la présence de poussières dans le maître cylindre de frein d’un tracteur agricole ayant entrainé un accident, poussières dont l’origine et la nature étaient finalement restées indéterminées .

2. La gravité du vice et les impropriétés d’usage du véhicule

La seconde condition posée pour qu’une déficience d’une automobile autorise son acheteur à agir en garantie contre le vendeur, c’est le caractère de gravité que doit présenter le défaut qui en est à l’origine.

Sur ce point, comme le précise le texte de l’article 1641 du Code Civil, le vice doit rendre la chose impropre à l’usage auquel on la destine ou diminuer tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il l’avait connu.

Or l’usage premier et essentiel d’une automobile, par définition, c’est de pouvoir circuler et il serait donc tentant, pour la matière, de transposer la notion d’impropriété de la chose à sa destination en notion d’inaptitude ou d’impropriété à la circulation.

Il semble pourtant que l’on ne puisse pas systématiquement confondre ou assimiler ces deux notions, assimilation que l’on retrouve parfois sommairement dans certaines décisions bien qu’elle ne rende pas toujours compte de la diversité des cas de figure.

Un excellent auteur a parfaitement résumé la difficulté : il existe une “hiérarchie des usages possibles d’une chose déterminée” et la notion d’aptitude à la circulation ne permet donc pas d’affiner l’analyse puisqu’elle est susceptible de plusieurs interprétations, qui vont de la plus large à la plus étroite.

Comme cela a été également fort justement relevé, “la délimitation de la notion de vice grave est tributaire de la détermination de l’usage auquel le véhicule a été destiné” , ce qui conduit naturellement les Tribunaux, pour juger de la gravité d’un vice, à rechercher à quel modèle d’utilisation vendeur et acheteur faisaient référence lorsqu’ils ont conclu la vente.

Précisons à ce propos qu’il s’agit de l’usage entré dans le champ du contrat, de celui sur lequel les parties étaient expressément ou implicitement d’accord lors de sa conclusion, à l’exclusion de toute modification d’usage à l’initiative de l’acheteur, postérieurement à la vente .

De ce qui précède, il résulte que le vice caché donnant lieu à garantie n’est donc pas seulement le vice qui rend le véhicule inutilisable au regard de sa fonction première, c’est-à-dire qui le rend inapte à rouler.

Il peut s’agir également, comme le précise l’article 1641 du Code Civil, d’un vice qui diminue significativement son utilisation, de telle manière que si l’acheteur en avait eu connaissance, on peut présumer qu’il aurait purement et simplement renoncé à son achat ou n’aurait offert qu’un prix inférieur à celui convenu pour la transaction.

Envisagé sous cet angle, le vice caché engendre un amoindrissement ou des restrictions dans l’utilisation du véhicule plutôt qu’une impossibilité d’usage.

Pour juger de cet éventuel amoindrissement, il faut donc cette fois se référer à un modèle de “pleine utilisation” du véhicule incriminé

Comme l’indique le Professeur LARROUMET, “Dans la mesure où un usage particulier de la chose n’a pas fait l’objet de l’accord des parties et où une qualité particulière n’a pas été par elles expressément envisagée, il s’agit des qualités requises pour un usage courant de la chose conformément à l’utilité qui doit en être objectivement attendue, c’est-à-dire celle qui est requise pour toutes les choses du type auquel appartient la chose vendue.”

A titre d’illustration, le modèle abstrait d’utilisation d’un véhicule de collection n’est pas celui d’un véhicule ayant vocation à être utilisé tous les jours même si certains érigent en principe ce qui constitue, dans la norme commune, l’exception.

Il n’en reste pas moins que si le véhicule dont l’usage est présumé restreint est inapte à promener son acheteur le dimanche, on pourra considérer que son utilisation est tellement diminuée qu’il ne l’aurait sûrement pas acquis, autorisant en conséquence l’acquéreur à agir en garantie.

De la même manière, en ce qui concerne par exemple les exigences de confort, l’appréciation sera différente s’il s’agit d’un modèle de luxe ou d’un modèle plus courant. Il a ainsi été jugé, s’agissant de turbulences d’air dans l’habitacle lors de l’ouverture de la vitre arrière d’un véhicule de gamme moyenne, que ce défaut ne constituait pas un vice pouvant justifier une garantie car il ne portait pas suffisamment atteinte au niveau de confort qui pouvait être attendu du véhicule litigieux.

En revanche, le défaut mécanique provoquant un dandinement dans les virages a été jugé comme un inconvénient intolérable, l’acquéreur du véhicule litigieux l’exploitant dans le cadre d’une entreprise de pompes funèbres .

Compte tenu de ces précisions, quels sont les principaux critères ou les éléments d’appréciation retenus pour fixer le degré de gravité du vice ouvrant la voie d’une action en garantie ?

a) Véhicules neufs et véhicules d’occasion

Pour l’automobile comme pour tout autre bien, l’appréciation de la gravité d’un vice peut être plus ou moins sévère : soit on considère que de légers désordres de fonctionnement engendrent une véritable inaptitude à circuler normalement, soit on considère au contraire que l’inaptitude à circuler ne peut résulter que d’une impossibilité totale d’utilisation du véhicule vendu.

Et pour se situer entre ces deux appréciations extrêmes dans un litige donné, l’analyse de Monsieur Gérald LEVY paraît excellente : elle passe par la détermination du niveau de service que l’acheteur est en droit d’attendre du véhicule qu’il a acquis.

Le niveau de service exigible étant lui-même fonction de la nature de l’objet, la première distinction à opérer concerne les véhicules neufs et les véhicules d’occasion.

S’agissant d’un véhicule neuf ou très récent, le service qu’il doit rendre à son acquéreur doit être maximal et l’appréciation de la gravité du vice doit être la moins sévère possible.

Le contentieux autour des véhicules neufs demeure cependant assez rare, non seulement parce qu’ils sont nécessairement plus fiables mais également en raison de l’existence presque généralisée des garanties conventionnelles offertes par les constructeurs ou les revendeurs professionnels. En effet, les clauses qui organisent ces garanties ne déterminent en général pas de degré de gravité des défauts de nature à faire jouer la garantie, pour autant qu’ils ne résultent pas d’une faute du conducteur (négligence d’entretien, utilisation non conforme aux spécifications etc…).

Lorsque l’objet de la transaction est, au contraire, constitué par un véhicule d’occasion, le service qui peut en être attendu par l’acheteur est atténué. Il reste à déterminer dans quelle mesure.

Le principe d’appréciation en la matière est également très simple : le niveau de service que l’acheteur est en droit de revendiquer sera inversement proportionnel à l’âge et à la durée d’utilisation du véhicule d’occasion au moment de son achat. Plus le véhicule sera récent et son kilométrage faible, plus on se rapprochera de l’appréciation indulgente de la gravité du vice qui préside en matière de véhicules neufs .

En revanche, plus le véhicule sera ancien et son kilométrage important, plus les déficiences qui l’affectent devront être graves pour légitimer un recours de l’acheteur .

Pour illustrer le propos, une consommation d’huile importante sera considérée comme une vice suffisamment grave pour légitimer la résolution de la vente d’un véhicule neuf (ou d’occasion mais ayant peu roulé) alors qu’un recours fondé sur la même cause, dans l’hypothèse d’un véhicule à fort kilométrage, sera voué à l’échec.

Car, comme le rappelle souvent la jurisprudence, le principe de la prévisibilité de certains défauts, même assez graves, est l’une des caractéristiques essentielles des véhicules d’occasion .

Un auteur a parfaitement illustré le principe en indiquant que “la voiture d’occasion est avant tout un assemblage de pièces complexes, une machine déjà capricieuse comme toute mécanique, mais son usure, au surplus, expose tout de même à quelques mécomptes.”

Mais cela n’exclut pas, bien au contraire, toute garantie due par le vendeur d’un véhicule d’occasion, même si certaines décisions exigent la preuve d’un vice “d’une particulière gravité” .

D’autres décisions expriment cette idée sans doute avec plus de précision en faisant référence à une “usure anormale” ou en précisant que “s’agissant d’un véhicule d’occasion, il est certain que le vendeur doit répondre des conséquences imprévues de la vétusté” .

Constituant un critère fréquemment retenu par les Tribunaux pour délimiter le champ de la garantie due pour les véhicules d’occasion, la notion de “conséquences imprévues de la vétusté” mérite donc que l’on en cerne mieux les contours.

b) L’exclusion du vice relevant de la vétusté

Comme l’écrit un auteur, “le vice dont se plaint l’acheteur – essentiellement distinct du seul caractère usagé de la chose – doit être apprécié de façon relative, en ce sens qu’il doit dépasser ce qui était normalement prévisible dans un véhicule d’occasion, en un mot il doit être un défaut qu’une chose même usagée ne devrait pas présenter.”

A la vérité, il s’agit une nouvelle fois d’une question éminemment technique.

L’objectif en la matière consiste à déterminer, pour un véhicule donné affecté d’un vice caché, si ce dernier résulte du vieillissement dû tant à son utilisation qu’à son âge – qu’il s’agit d’un “vice de vétusté” – ou si au contraire la défectuosité constatée peut être considérée comme anormale sur le véhicule litigieux.

En dehors des conséquences systématiques que l’usure fait subir aux différents composants mécaniques des automobiles quel qu’en soit le type, l’expérience acquise par les experts automobiles sur les différents modèles du marché après quelques années de commercialisation leur permet de répertorier leurs points faibles ou leurs défaillances spécifiques.

Et la connaissance des défauts dus à l’usure qui sont inhérents à un certain modèle (par exemple, une absence localisée de protection contre la corrosion engendrant immanquablement de la rouille à cet endroit) permet donc souvent à l’expert, en présence d’un exemplaire précis affecté d’un vice, de dire si ce défaut relève ou non “des conséquences imprévues de la vétusté”.

Si l’on peut considérer que le vice d’un modèle résultant de l’usure est objectivement connu et qu’il se manifeste de façon normale sur l’exemplaire litigieux, il ne pourra pas fonder l’acheteur à s’en prévaloir dans le cadre d’un recours en garantie.

En revanche, bien qu’abondamment décrit, si un vice “classique” d’un modèle est anormalement développé sur un exemplaire, il pourra alors éventuellement donner lieu à garantie car comme l’indique H. ROLLAND “analysé en un objet de seconde qualité, l’objet d’occasion doit donc avoir conservé ses aptitudes et son utilité économiques, sinon le vendeur engage sa responsabilité” .

Dans cette recherche, les magistrats prendont le plus souvent en considération le prix convenu, pour le comparer à la cote de l’occasion ou encore les propres promesses du vendeur, notamment s’il avait rédigé une petite annonce dans un journal spécialisé : ils seront nécessairement plus rigoureux envers le vendeur lorsque celui-ci aura sollicité un prix supérieur à la cote moyenne ou aura par exemple indiqué que le véhicule était en parfait état.

Au registre des appréciations de nature économique, notons enfin que pour fixer le niveau de gravité de nature à légitimer l’action en garantie de l’acheteur, les Tribunaux retiennent parfois également le fait que le coût de la réparation, si elle est possible, dépasse la valeur vénale du véhicule .

c) La “dangerosité” du véhicule

Entre le vice ne préjudiciant que l’agrément, en principe exclu du champ de la garantie légale, et celui qui porte gravement atteinte à l’utilisation du véhicule, la limite est essentiellement variable et donc parfois difficile à déterminer.

A titre d’exemple caricatural, personne ne viendra contester qu’un défaut du système de freinage constitue un défaut mécanique grave sans pour autant que cela n’engendre nécessairement et dans l’immmédiat une impossiblité pratique d’utiliser le véhicule, lequel continue techniquement à pouvoir circuler. Faut-il pour autant refuser à l’acheteur de se prévaloir d’un tel défaut pour agir en garantie ?

Pour pallier les difficultés qui résistent aux analyses les plus fines, le seuil qui est souvent retenu par les Tribunaux pour marquer le niveau de gravité exigé pour qu’un défaut constitue juridiquement un vice caché autorisant l’acheteur à dénoncer la vente, c’est le risque qu’il engendre pour la sécurité d’utilisation du véhicule.

Dès que le défaut sera de nature à rendre le véhicule dangereux, il sera presque systématiquement jugé comme satisfaisant à la condition de gravité posée pour l’action en garantie .

De ce point de vue, la destination d’une automobile, ce n’est donc pas tant son aptitude à circuler que son aptitude à circuler dans des conditions de sécurité acceptables pour ses occupants.

Or à l’heure où le législateur se fait de plus en plus sévère quant aux obligations d’entretien des véhicules, notamment en rendant obligatoire, lors des visites périodiques, la réparation de défauts de plus en plus nombreux, cette tendance devrait logiquement se transposer dans la jurisprudence en matière de vices cachés.

d) Quelques exemples de vices cachés reconnus comme suffisamment graves

1) Affectant la carrosserie ou la structure

oxydation très importante et irréparable de la coque d’une Peugeot 304 cabriolet 1970, qui n’était pas relèvé dans le rapport de contrôle technique alors que l’examinateur aurait dû la déceler, ce qui a engendré, en outre, une responsabilité contractuelle du centre de contrôle à l’égard du vendeur tenu, dans ces circonstances, à le garantir du remboursement du prix à l’acheteur ,
oxydation profonde du dessous de caisse susceptible d’entraîner la rupture de pièces qui n’est visible qu’une fois que le véhicule a été placé sur un pont et qu’il a été nettoyé de la boue collée aux endroits attaqués par la rouille
déformation d’un longeron et de la traverse moteur ,
défaut d’un longeron et des disques de freins sur une automobile d’occasion récente, justifiant la seule action estimatoire ,
longeron de châssis arrière boulonné, support de bras de suspension arrière fendu, traverses et longerons oxydés ,
corrosion irréparable de la coque dissimulée par collage de toiles peintes sur un véhicule âgé de 14 ans .

2) Affectant les organes mécaniques ou de sécurité

défectuosité du “moteur, organe essentiel de la machine” ne pouvant être décelée “qu’après une marche de plusieurs milliers de kilomètres”
défaut du collier de serrage de la durite d’arrivée d’essence au carburateur ayant engendré l’incendie d’un véhicule neuf, après 3 mois et demi et qu’il ait parcouru seulement 2.000 km ,
panne moteur due à de graves détériorations du vilebrequin sur un véhicule n’ayant parcouru que 28.426 km ,
culasse vrillée et épaulement important provenant de l’usure de l’intérieur des chemises ,
fissures multiples de la fonderie de la boîte de vitesse, masquées en outre par un produit de colmatage ,
défaut de goupillage de l’assemblage de la direction ,
usure excessive et anormale de la vis sans fin de la direction ,rupture de la rotule centrale de la colone de direction ,
vibrations excessives du véhicule ,
défaut de la pompe à huile ,
cassure d’un boulon de tête de bielle ,
défaut du tambour de frein d’une caravane ayant engendré un accident ,
défectuosité du système de freinage ,
consommation d’essence supérieure de 36% à celle annonçée par le constructeur dans ses brochures publicitaires ,
pannes successives du système de freinage au cours de 700 premiers kilomètres parcourus par l’acheteur avec le véhicule d’occasion ,
cassure du boulon fixant le berceau-support du radiateur ayant occasionné la rupture des durites et, par suite, la détérioration du moteur ,
fissure du bloc moteur colmatée avec des produits anti-fuite .

e) Quelques exemples de vices cachés jugés insuffisamment graves, n’atteignant que l’agrément ou résultant de l’usure normale d’un véhicule d’occasion ou ancien :

fissure d’un cylindre, les magistrats s’étant montrés très exigeants en l’espèce en considérant qu’il s’agissait d’un organe pouvant être “facilement et rapidement remplacé” ,
déformation de la structure consécutive à un choc avant gauche d’une Jaguar XK 1956 bénéficiant d’une carte grise collection ,
turbulences d’air dans l’habitacle lors de l’ouverture des vitres arrières ou vibrations du plancher ,
longueur insuffisante d’un cable de raccordement électrique d’une caravane au véhicule tracteur ,
usure d’un arbre à came sur un véhicule ayant parcouru 120.000 km ,
coulage d’une bielle dû à un mauvais graissage causé par un encrassement du filtre à huile sur un véhicule affichant 47.000 km au compteur, ce qui constituerait une décision très sévère si des signes inquiétants n’avaient pas précédé la survenance de la panne (émissions de fumées et échauffement du moteur), lesquels auraient dû alerter l’acquéreur, ce qui aurait permis d’éviter l’essentiel du dommage .

3. Le caractère occulte du vice – l’exclusion du vice apparent

Nous avons vu que le vice caché ouvrant la voie de la garantie légale est un défaut qui doit être né avant le contrat et qui doit affecter gravement son utilisation. Il faut encore qu’il ne puisse être considéré comme un vice apparent.

Bien entendu, rappelons d’abord que le caractère occulte que doit présenter le vice pour justifier la garantie du vendeur n’a pas obligatoirement à résulter d’une dissimulation volontaire : le vice caché n’est pas obligatoirement le vice qui “a été caché”.

En effet, et dans cette hypothèse, il s’agirait au premier chef d’une manoeuvre dolosive de nature à tromper le consentement de l’acheteur, manoeuvre dont on sait qu’elle est sanctionnée par la nullité du contrat.

Ceci précisé, l’action en garantie pour vices cachés ne peut constituer un moyen efficace de revenir sur un achat précipité et ne saurait d’avantage servir à l’acheteur de mauvaise foi qui, bien ayant noté un défaut grossièrement réparé, tenterait par la suite de s’en prévaloir auprès du vendeur pour obtenir la restitution d’une partie du prix.

En effet, la parade résulterait alors de l’article 1642 du Code Civil qui dispose que “le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même”.

Aux vices cachés s’opposent donc naturellement les vices apparents, lesquels ne peuvent en aucune façon ouvrir à l’acheteur une action en garantie. Quels sont-ils dans les ventes d’automobiles ?

a) Vices révélés par l’examen ou l’essai

Constituent ainsi des vices apparents, tous ceux qui ont été révélés par l’essai routier du véhicule ou l’examen de l’extérieur, sans autre investigation particulière ou démontage.

Mais le vice apparent n’est pas uniquement celui qui est ostensible et que révèle un des examens superficiels, mais aussi celui qu’un homme de diligence moyenne aurait découvert, en procédant à des vérifications élémentaires .

L’acheteur est donc tenu à un examen aussi méticuleux que ses connaissances le lui permettent.

En outre, on comprend aisément qu’en matière de véhicules d’occasion, l’acheteur soit juridiquement tenu à une vigilance plus étendue que s’il achetait un véhicule neuf.

S’il ne procède pas aux vérifications élémentaires, au moins celles qui sont à la portée de tout automobiliste , il sera présumé avoir accepté par avance l’éventualité de vices cachés et toute action en garantie lui sera alors refusée .

Précisons encore que la multiplicité des vices apparents peut même parfois priver l’acheteur d’un recours qui serait fondé sur un vice supplémentaire qui, à la différence des précédents, serait caché car il existe en effet une forte présomption qu’un véhicule comportant de nombreux défauts apparents en comporte également d’autres qui le sont moins, même pour un acheteur profane normalement avisé .

b) Vices révélés par le rapport de contrôle technique

On rappellera qu’à de rares exceptions près, notamment pour les véhicules anciens circulant sous couvert d’une carte grise “collection” , tout vendeur d’un véhicule de plus de 4 ans est tenu de remettre à l’acheteur, préalablement à la vente, un rapport de contrôle technique établi dans un centre agréé et datant de moins de 6 mois .

Précisément institué à l’origine comme garantie pour l’acheteur en visant à l’informer sur l’état général du véhicule qu’il se propose d’acquérir, il existe des divergences significatives de jurisprudence sur le point de savoir si un défaut noté sur le rapport de contrôle technique présenté à l’acheteur lors de la transaction fait de ce défaut un défaut apparent dont ce dernier ne sera plus fondé à se plaindre .

Certaines décisions considèrent que les défauts qui sont révélés par l’examen du contrôle technique du véhicule constituent des vices apparents , d’autres jugent le contraire, notamment lorsque les magistrats estiment qu’à la lecture des indications du rapport de contrôle, l’acheteur a pu se méprendre sur la nature ou la gravité du vice ainsi que sur ses conséquences potentielles sur le fonctionnement du véhicule.

c) L’influence de la qualité de l’acheteur

Contrairement à l’acheteur occasionnel ou profane, l’acheteur professionnel est présumé connaître les défauts de l’automobile qu’il achète, par exemple dans le cadre d’une “reprise”.

La qualité d’acheteur professionnel “transforme” ainsi, en quelque sorte, les vices cachés en vices apparents dont l’acheteur n’est pas en droit de se plaindre.

C’est encore avec talent que la jurisprudence sur cette question a été singularisée en ce qu’elle tendait “à présumer la cécité naturelle des acheteurs occasionnels et la clairvoyance acquise des acheteurs professionnels .

Les raisons de cette sévérité sont aisées à comprendre : on considère qu’un professionnel, à la différence d’un non professionnel, dispose des compétences, voire des installations techniques, lui permettant de procéder aux contrôles utiles pour détecter les anomalies.

Il reste cependant à préciser ce qu’il faut entendre par acheteur professionnel. S’agit-il exclusivement des professionnels de l’automobile et même de la réparation automobile ? Bref, est-ce que seuls sont privés du recours les mécaniciens patentés, en raison de leurs connaissances en mécanique ?

La jurisprudence dominante semble avoir opté pour une définition extensive de l’acheteur professionnel, appréciée néanmoins au cas par cas en fonction des qualifications professionnelles précises de chacun.

Ainsi, la qualité d’acheteur professionnel a-t-elle été reconnue notamment à un transporteur routier , un représentant de commerce dans le secteur de l’automobile ou à un ajusteur .

En revanche, n’ont pas été considérés comme acheteurs professionnels, un entrepreneur de travaux publics lors de l’achat d’un engin de chantier ou encore un gérant de station service lorsqu’il se rendait acquéreur d’une voiture de tourisme, car ce dernier n’avait pas reçu de formation en mécanique mais en installation de sanitaires .

Mais l’on se trouve parfois devant cette contradiction qu’un acheteur peut disposer des connaissances lui permettant de juger de l’état d’une automobile sans que cela puisse exclure d’importantes erreurs d’appréciation de sa part.

Et c’est pour tenir compte de ce cas de figure que la Cour de cassation a reconnu à l’acheteur professionnel ou à l’acheteur reconnu comme tel le droit de se prévaloir de vices cachés pour obtenir la résolution d’une vente dès lors qu’il est établi qu’il n’avait pas décelé les défauts parce qu’ils étaient difficilement perceptibles sans démontage .

Cette solution paraît extrêmement raisonnable puisqu’elle tient compte d’une réalité technique difficilement contestable, à savoir que certains vices peuvent échapper même à la vigilance d’un homme expérimenté : on parle en la matière de “vices indécelables”, c’est-à-dire de vices indécelables sans démontage .

Dans cette même logique, il convient encore de préciser que lorsque le vendeur est de mauvaise foi, qu’il s’est rendu coupable de ruses pour tromper l’acheteur sur l’état du véhicule vendu, notamment par des maquillages plus ou moins habiles, peu importe que ce dernier soit un acheteur professionnel ou non : les Tribunaux considèrent en effet dans cette hypothèse que l’acheteur professionnel retrouve la possibilité de se prévaloir des vices cachés puisque ses facultés d’appréciation ont été délibérément mises en échec par une manoeuvre frauduleuse du vendeur.

d) Quelques exemples de défauts jugés comme constituant des vices apparents

1) Affectant la carrosserie ou la structure

corrosion du plancher et de la coque ,
des joints de portes détériorés.
2) Affectant les organes mécaniques ou de sécurité

pneu réparé sur sa face interne par des rustines collées à froid, présentant une usure supérieure à 75 % extérieurement visible ,
pneus usés ou batterie, démarreur, boite de vitesse, feux arrières, moteur d’essuie-glace ne fonctionnant pas correctement,

moteur émettant des fumées importantes, un témoin de pression d’huile restant allumé, montée anormale en température du circuit de refroidissement ,
fente du carter moteur-boîte réparée avec du mastic résineux et de la pâte métallique décelable par simple examen du dessous du véhicule , ce qui constitue certainement une décision très sévère.

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Il est certain que dans les transactions portant sur des objets complexes, les différents systèmes d’information de l’acheteur rendus obligatoires par les pouvoirs publics concourent tous à une plus grande sécurité juridique. Tel est le cas du système du contrôle technique mis en place en matière de vente d’automobiles, même si à notre connaissance, la Cour de cassation ne s’est pas à ce jour prononcée sur sa portée exacte dans l’information de l’acheteur et sur les conséquences engendrées sur le plan de la garantie des vices cachés.

Il n’en reste pas moins que le système du contrôle technique conserve ses limites puisque les contrôles sont effectués sans démontages et ne peuvent de ce fait renseigner l’acheteur sur l’état d’usure des organes essentiels du véhicule comme le moteur ou la boîte de vitesse, sauf peut-être pour stigmatiser des défauts extérieurement visibles comme les fuites d’huile.

Mais d’autres difficultés peuvent aussi résulter du fait que le formalisme en matière de vente de véhicules automobiles n’est pas très contraignant : les parties n’ont en effet nullement l’obligation de mettre en forme un véritable contrat puisque seule est exigée la remise à l’acquéreur d’un certificat de cession sur un imprimé réglementaire (verso du Cerfa n° 47-0204).

Or sur ce plan, on peut regretter que le modèle de certificat de cession soit trop sommaire. Il pourrait en effet utilement être complété par diverses mentions constituant certainement des informations utiles pour l’acheteur mais également pour les Juges lorsqu’ils sont saisis par la suite d’un recours en garantie : interventions récentes d’entretien ou de remise en état dont il est justifié sur facture, quittance de remise des différents documents que le vendeur doit obligatoirement remettre à l’acheteur (carte grise, certificat de situation ou”non gage”, rapport de contrôle technique, vignette et son talon).

Ces indications complémentaires auraient en outre le mérite de “moraliser” la transaction puisque le vendeur aurait nécessairement moins tendance à formuler des promesses ou des renseignements fantaisistes s’il s’agissait de s’engager par écrit.

Bref, tous ce qui confère à l’acheteur une information plus rigoureuse est utile. Mieux ce dernier sera éclairé sur les qualités objectives de l’automobile qu’il achète, mieux il le sera sur ce qu’il est en droit d’en attendre. Telle est la recherche permanente d’équilibre entre les intérêts respectifs du vendeur et ceux de l’acheteur qui singularise le droit de la vente.

Par ordonnance en date du 17 février 2005, le droit de la vente a été notablement modifié avec pour objectif de conférer aux consommateurs de nouvelles prérogatives.

Ces nouvelles dispositions ont été codifiées aux articles L.211-1 à L.211-18 du Code de la consommation.

Domaine d’application

Les nouvelles règles en matière de conformité s’appliquent à la vente des véhicules conclues à compter du 18 février 2005 (L.211-1) entre un vendeur professionnel et un acheteur agissant en qualité de consommateur (L.211-3).

Obligation du vendeur

Le vendeur est tenu de livrer un véhicule conforme au contrat (bon de commande) et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance (L.211-4). L’acheteur ne peut cependant contester la conformité en invoquant un défaut qu’il connaissait ou ne pouvait ignorer lorsqu’il a contracté (L.211-8).

Il en résulte que le consommateur est en droit de se plaindre des problèmes de conformité directement auprès du vendeur, sans avoir à s’adresser au constructeur.

Définition de la conformité

Pour être conforme au contrat, le véhicule livré doit (L.211-5):

– être propre à l’usage habituellement attendu d’un bien semblable, correspondre à la description donnée et posséder les qualités que le vendeur a présentées à l’acheteur sous forme de modèle ainsi que les qualités qu’un acheteur peut légitimement attendre eu égard aux déclarations publiques faites par le vendeur, le constructeur ou son représentant, notamment dans la publicité, sauf pour le vendeur à démontrer qu’il les ignorait et n’était légitimement pas en mesure de les connaître (L.211-6),

– ou présenter les caractéristiques définies d’un commun accord par les parties ou être propre à tout usage spécial recherché par l’acheteur, porté à la connaissance du vendeur et que ce dernier a accepté.

Présomption pendant 6 mois

Les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de six mois à partir de la délivrance du véhicule sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire qu’il appartient au vendeur de rapporter (L.211-7).

A l’issue de ce délai de six mois, il appartiendra à l’acheteur de prouver que le défaut de conformité qu’il invoque existait au moment où le véhicule lui a été livré.

Réparation ou remplacement

En cas de défaut de conformité, l’acheteur choisit en principe entre la réparation et le remplacement sans aucun frais, sans toutefois être en droit d’exiger l’une ou l’autre de ces modalités si elle engendre, ce qui sera la plupart du temps le cas pour le remplacement d’un véhicule, un coût manifestement disproportionné par rapport à l’autre modalité, compte tenu de la valeur du bien et de l’importance du défaut.

Si la réparation et le remplacement sont impossibles, ou si l’une ou l’autre de ces modalités ne peut être mise en oeuvre dans un délai d’un mois suivant la réclamation de l’acheteur ou présente un inconvénient majeur pour lui, ce qui sera objectivement rarement le cas pour un véhicule, l’acheteur est en droit de rendre le véhicule et de se faire restituer le prix (sauf si le défaut de conformité est mineur) ou de garder le véhicule en se faisant restituer une partie du prix (L.211-9 et L.211-10), alternative identique à acheteur qui se plaint d’un vice caché. Une expertise destinée à chiffrer la moins-value affectant le véhicule compte tenu du défaut de conformité invoqué sera dans cette hypothèse pratiquement incontournable.

Quelle que soit la modalité mise en oeuvre, l’acheteur peut éventuellement solliciter des dommages et intérêts en démontrant un préjudice, notamment du fait de l’immobilisation du véhicule (L.211-11). De plus, le dispositif ainsi mis en place ne prive pas l’acheteur des autres recours prévus par la loi et notamment de l’action en garantie des vices cachés (L.211-13).

Le vendeur qui est contraint de mettre en oeuvre une réparation ou un remplacement à la suite d’une réclamation peut exercer une action récursoire à l’encontre de son propre vendeur ou du constructeur afin de solliciter d’être garanti des conséquences de l’action du consommateur (L.211-14).

Délai pour agir

Le consommateur qui entend invoquer un défaut de conformité doit agir, c’est-à-dire saisir une juridiction et non pas seulement écrire même en recommandé, dans un délai maximal de deux années à compter de la délivrance du bien (L.211-12).

L’obligation de délivrance du vendeur, c’est l’obligation dans laquelle il se trouve de remettre à l’acheteur le véhicule tel qu’il était présenté.

Concrètement, le vendeur s’exécute de cette obligation au moment où, ayant reçu le chèque de réglement du prix, il remet à l’acheteur les clés de l’automobile.

Délivrance des accessoires

L’article 1615 du Code Civil précise que l’obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel.

Sont ici visés les accessoires du véhicule au sens d’équipements tels que volant en bois, crochet d’attelage, jantes alu etc…

Car parfois, l’acheteur essaye un véhicule équipé d’un superbe auto-radio, relève qu’il bénéficie d’une roue de secours toute neuve et d’une belle trousse à outils pour découvrir ensuite, le jour où il vient prendre livraison de l’engin, que l’ensemble a disparu….dépouillé de ces petits avantages auxquels chacun est si sensible !

Le vendeur soutenant quant à lui, souvent de mauvaise foi, qu’il n’avait jamais été question de ces éléments lors de la discussion sur le prix de vente !

Pour se prémunir contre toute difficulté sur le sujet, l’idéal est de répertorier par écrit la liste des accessoires qui accompagnent le véhicule vendu, ce qui supprimera toute mauvaise surprise.

A défaut, il suffira de ne remettre au vendeur le chèque de réglement du prix qu’après avoir vérifié que “tout est bien là”.

Accessoires juridiques

Mais il faut savoir que l’ensemble des documents administratifs du véhicule sont également considérés juridiquement comme des accessoires. Leur remise à l’acheteur constitue donc une obligation essentielle du vendeur (1).

Il s’agit avant tout de la carte grise, mais pas seulement.

Il a en effet également été jugé que le défaut de remise de la vignette était de nature à légitimer un recours de l’acheteur. Il est de principe qu’attachée au véhicule dès le fait générateur de l’impôt, la vignette doit suivre le sort de ce dernier en cas de cessions successives (2).

En ce qui concerne le contrôle technique, le principe a également été posé que le défaut de remise à l’acheteur pouvait lui permettre d’obtenir l’invalidation de la vente (3).

Cette solution jurisprudentielle est aujourd’hui significativement renforçée par l’obligation réglementaire qui est faite au vendeur de remettre à l’acheteur un rapport de contrôle technique.

En effet, il a été récemment introduit un article 5 bis dans le décret du 4 octobre 1978 qui dispose sans la moindre ambiguïté (4) :

“Tout vendeur professionnel ou non professionnel d’un véhicule automobile soumis à la visite technique prévue par les dispositions des articles R.119-1 et R.120 du code de la route remet à l’acheteur non professionnel, avant la conclusion du contrat de vente, le procès-verbal de la visite technique établi depuis moins de six mois, ainsi que les procès-verbaux des éventuelles contre-visites”.

Mais réciproquement, le vendeur est en droit de retenir la carte grise tant qu’il n’est pas payé du prix (5), droit dont il peut même se prévaloir contre un éventuel sous-acquéreur : si l’acheteur, sans payer son vendeur, revend la voiture à quelqu’un d’autre, le second acheteur ne pourra contraindre le premier vendeur à lui délivrer la carte grise qu’il retient, même s’il a payé le prix du véhicule à l’intermédiaire malhonnête.

Comment réagir en cas de difficultés ?

Si l’acheteur a payé le prix convenu et que le vendeur ne lui remet pas les documents administratifs indispensables, promettant par exemple de le faire ultérieurement, l’acheteur se trouvera devant une alternative.

D’abord, celle de demander en Justice que le vendeur soit condamné sous astreinte à lui remettre les documents manquants, c’est-à-dire qu’il soit condamné à lui payer une sorte d’”amende” pour chaque jour de retard qu’il aura à s’exécuter.

Cette action judiciaire présente d’ailleurs l’avantage de pouvoir être intentée par la voie simple et rapide du référé (6).

En revanche, et s’il apparaît que le problème est plus grave – le vendeur étant dans l’impossibilité de présenter les documents – seule une solution plus radicale s’imposera, à savoir celle consistant à demander purement et simplement la résolution judiciaire de la vente, cest-à-dire son anéantissement.

Lorsque la résolution est prononcée, les conséquence sont pratiquement les mêmes qu’en matière de nullité du contrat pour vices du consentement : le vendeur devra restituer le prix qu’il a reçu et l’acheteur rendra quant à lui le véhicule “aux accessoires manquants”.

La validité d’un contrat de vente suppose d’abord que le consentement des parties soit libre et éclairé, c’est-à-dire qu’il ne soit empreint d’aucun des “vices du consentement” reconnus par notre Droit.

C’est l’article 1109 du code civil qui dispose “qu’il n’y a point de consentement valable, si le consentement n’a été donné que par erreur, ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol.”

Exclusion faite de la violence qui reste une hypothèse très marginale (c’est celle où une partie signe sous la contrainte), l’erreur et le dol sont les deux vices du consentement qui pourront le plus souvent être rencontrés lors de la conclusion d’un contrat de vente d’un véhicule.

L’erreur et le dol ont en principe vocation à affecter surtout le consentement de l’acheteur, même s’il n’est pas exclu que le vendeur puisse également en être victime : ce serait par exemple l’hypothèse, presque purement théorique, où il vendrait par erreur une automobile croyant qu’il s’agit d’une réplique alors qu’elle s’avèrerait par la suite être un exemplaire authentique.

L’erreur

L’erreur, c’est l’appréciation inexacte par l’acheteur d’une qualité essentielle de l’automobile achetée.

Pour justifier l’annulation du contrat, l’article 1110 du code civil impose que l’erreur ait porté sur la “substance même” de la chose c’est-à-dire sur les qualités essentielles de l’automobile vendue.

Deux catégories de “qualités essentielles” sont à distinguer : celles qui le sont de manière objective, tout le monde s’accordant à leur propos (authenticité de l’auto, état général etc… ) et celles qui relèvent d’une analyse de la psychologie de l’acheteur qui attendait telle qualité spécifique que le véhicule n’offre pas en réalité (puissance, capacité de chargement etc…).

Dans ce dernier cas, l’erreur de l’acheteur ne pourra entrainer la nullité de la vente que s’il prouve non seulement que cette qualité était déterminante pour lui mais également qu’il en avait averti le vendeur.

Compte tenu de ces principes, les erreurs les plus couramment invoquées portent sur l’état et sur le millésime du véhicule vendu.

Pour l’état, lorsque le vendeur en a fait à tort une présentation élogieuse, l’erreur de l’acheteur sera constituée par le fait qu’il pensait acquérir un véhicule fiable susceptible de rouler longtemps (1).

En ce qui concerne le millésime, les Tribunaux considèrent depuis longtemps qu’il constitue une qualité essentielle des voitures d’occasion (2).

Pour les véhicules anciens, cette solution doit être nuancée car le millésime n’est pas toujours une caractéristique essentielle.

Pour certains véhicules, il est indiscutablement de nature à influer sur leur intérêt. Les amateurs éclairés savent qu’il existe des années au cours desquelles la production de certains constructeurs ou de certains modèles (voire ceux sortis de telle usine plutôt que de telle autre) étaient affectés de vices de fabrication auxquels il pourrait être onéreux ou même techniquement impossible de remédier.

En revanche, pour d’autres marques ou d’autres modèles, le millésime est pratiquement neutre, notamment en ce qui concerne leur cote dans les transactions.

L’appréciation d’une éventuelle erreur en la matière relève donc d’une analyse au cas par cas.

Sachez en outre que l’erreur sur la valeur n’est pas une cause de nullité du contrat mais que le prix est souvent un élément d’appréciation important pour les magistrats : si l’on paye cher un véhicule, c’est qu’on croit pouvoir en attendre certaines qualités.

De plus, pour être efficacement invoquée, l’erreur ne doit pas être “inexcusable”, ce qui serait par exemple le cas de celui qui achète un véhicule d’une marque inexistante (3)…

Le dol

Le dol, c’est le nom que l’on donne à la tromperie ou au mensonge dans le vocabulaire propre au droit civil.

L’exemple classique du dol – on parle de manoeuvre dolosive – c’est le fait pour le vendeur d’une maison de la faire visiter le jour d’une grève aérienne pour cacher l’existence du terrain d’aviation qui jouxte le fond du jardin….

Transposé à l’automobile, on imagine bien quelles manoeuvres constituent un dol : maquillage de l’état du véhicule (4), modification du compteur kilométrique (5) etc…

Il est même admis que le dol puisse être constitué par le simple silence gardé par le vendeur sur une circonstance intéressant forcément l’acheteur comme par exemple un accident antérieur grave (6).

Pour justifier l’annulation d’un contrat de vente, l’article 1116 du Code civil précise que les manoeuvres pratiquées par l’une des parties doivent être telles qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.

Pour reconnaître l’existence d’une errreur ou d’un dol, les magistrats sont donc conduits à se livrer à une analyse psychologique du comportement des parties lors de la conclusion du contrat. Il faut savoir qu’ils sont assez sévères.

La sanction de l’erreur et du dol

L’existence d’une erreur ou d’un dol affecte la validité du contrat de vente et la sanction prévue est la nullité de l’accord : la vente est anéantie et chaque partie doit restituer à l’autre ce qu’elle a reçu.

Le vendeur rend le prix, l’acheteur rend le véhicule.

Dans la pratique, il est extrêmement fréquent qu’une partie remette à l’autre un chèque qu’elle qualifie de “chèque de garantie”, c’est-à-dire un chèque qui n’aurait pas vocation à être remis à l’encaissement, sauf en cas d’incident : non représentation de l’objet loué, perte, déterioration etc….

Qu’en est-il en matière de vente ?

Lors des pourparlers, alors que les parties considèrent qu’elles ne sont pas définitivement tombées d’accord pour conclure l’affaire, il n’est pas rare que l’acquéreur potentiel remette au vendeur un chèque pour lui faire preuve de son vif intérêt.

La difficulté essentielle en la matière, c’est que le plus souvent, le sort du chèque en question n’apparaît pas clairement dans l’esprit de l’un et de l’autre quand finalement, l’affaire ne se fait pas.

Qu’en est-il sur le plan juridique ?

Il faut savoir tout d’abord que la notion de “chèque de garantie” ne bénéficie en droit français d’aucune définition juridique précise, le chèque constituant avant tout un moyen de paiement parmi d’autres, qui répond à une réglementation très stricte.

Pour schématiser, lorsqu’on remet un chèque à quelqu’un, c’est comme si vous on lui remettait des espèces, ce qui n’autorise en principe à former opposition à son paiement qu’en cas de perte ou de vol.

Si un tribunal est saisi d’une difficulté, il devra donc se prononcer sur la nature juridique de la somme qui peut ainsi avoir été versée.

S’agit-il d’un acompte sur le prix ou simplement d’arrhes ?

En l’absence de toute précision dans un écrit signé des deux parties, un chèque remis par l’acquéreur au vendeur représentant une fraction du prix peut avoir, selon les circonstances, une nature juridique très différente.

Il peut s’agir :

– soit d’un chèque d’acompte sur le prix, avec cette conséquence principale que la vente est alors considérée comme définitivement conclue.

C’est par exemple l’hypothèse où l’acquéreur remet au vendeur un chèque tiré sur son comptant courant uniquement dans l’attente de pouvoir lui substituer un chèque de banque.
En principe dans ce cas, ni l’une ni l’autre des parties n’aura alors la falculté de se dédire, c’est-à- dire de renoncer à la vente.

Si le vendeur se montre intransigeant, l’acheteur sera notamment tenu de verser le solde du prix convenu, sans qu’il puisse renoncer au contrat en abandonnant la somme versée.

– soit d’un chèque représentant des arrhes, c’est-à-dire d’une somme permettant au candidat acquéreur de réserver l’affaire avant de prendre une décision définitive : s’il décide d’acheter, qu’il lève l’option selon l’expression consacrée, les arrhes versées viendront en déduction du prix de vente à payer.

En revanche, s’il renonce à son projet, le vendeur conservera les arrhes à titre d’indemnité pour n’avoir pas vendu le véhicule à un autre pendant le délai de réflexion accordé (ce délai n’étant pas déterminé par la loi, il convient donc de le fixer d’un commun accord).
Mais il faut également savoir que le versement d’arrhes au vendeur ne prive aucunement ce dernier de la faculté de renoncer lui-même à la vente.

En effet, s’il vend le véhicule à un tiers alors qu’il a reçu des arrhes, il ne sera tenu que de rendre une somme correspondant au double de leur montant pour indemniser celui qui avait versé des arrhes du fait d’avoir été évincé (voir ci-après).

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Les arrhes et l’acompte sont donc radicalement opposés dans leurs conséquences juridiques.

Dans les rapports entre particuliers, il est en conséquence hautement recommandé de préciser par écrit, lorsqu’on envisage d’avoir recours à l’une ou l’autre de ces techniques, à laquelle on entend se référer.

En revanche, pour ce qui est des rapports entre professionnels et particuliers, la solution est plus simple et l’utilité d’un écrit est moins grande puisque la Loi précise elle-même qu’à défaut de mention écrite sur la nature juridique des sommes versées d’avance, elles constituent des arrhes (voir ci-après, article 114-1 du Code de la Consommation).

L’article 1590 du Code Civil définit le régime juridique des arrhes :

“Si la promesse de vendre a été faite avec des arrhes chacun des contractants est maître de s’en départir, Celui qui les a données, en les perdant, Et celui qui les a reçues, en restituant le double.”

L’article 114-1 du Code de la Consommation dispose :

(…)

“Sauf stipulation contraire du contrat, les sommes versées d’avance sont des arrhes, ce qui a pour effet que chacun des contractants peut revenir sur son engagement, le consommateur en perdant les arrhes, le professionnel en les restituant au double.”

L’article 131-1 du Code de la Consommation prévoit quant à lui que 3 mois après leur versement, des intérêts au taux légal courrent sur les arrhes et les acomptes :

“Si la chose qu’on s’est obligé à vendre est mobilière, toute somme versée d’avance sur le prix, quels que soient la nature de ce versement et le nom qui est donné dans l’acte, est productive, au taux légal en matière civile (N.B : 5,82 % en 1995), d’intérêts qui courront à l’expiration d’un délai de trois mois à compter du versement jusqu’à réalisation ou restitution des sommes versées d’avance, sans préjudice de l’obligation de livrer qui reste entière.” (…)

Et précise :

“Les intérêts seront déduits du solde à verser au moment de la réalisation ou seront ajoutés aux sommes versées d’avance en cas de restitution.”

Vous voulez vous séparer de votre véhicule ? Dans la petite annonce que vous allez rédiger, peut-être serez-vous tenté “d’embellir” un peu votre auto…Jusqu’où pouvez-vous aller sans commettre un délit ?

Le contenu des petites annonces a une portée juridique, souvent mal connue.

Ainsi, une fois l’affaire conclue, si la déception de votre acheteur l’emporte finalement sur son enthousiasme, il pourra vous tenir rigueur de certaines indications que vous auriez abusivement porté dans votre annonce.

Il faut savoir en effet que la loi réprime la publicité mensongère, même dans le cadre d’une petite annonce et même si elle émane d’un non professionnel.

C’est ce qui résulte d’un arrêt de principe de la Cour de cassation rendu le 24 mars 1987 et qui reste aujourd’hui pleinement d’actualité. Or les sanctions prévues pour ce délit sont l’emprisonnement de trois mois à deux ans et/ou une amende de 1.000 francs à 250.000 francs (article L.121-2 et suivants du Code de la consommation).

La prudence s’impose donc…

Simple exagération et fausse indication

Ceci dit, toute indication fausse n’est pas répréhensible, surtout si vous êtes de bonne foi et qu’elle procède d’une simple erreur. On ne saurait non plus réprouver une certaine part d’exagération, une petite annonce étant destinée à vanter les mérites de l’auto à vendre.

Combien d’entre vous, auteurs de la mention “part toutes distances”, se hasarderaient-ils sur un Paris-Moscou au volant de l’auto qu’ils proposent ?

Dans le même esprit, on ne pourra vous reprocher de prétendre, même par écrit, que votre voiture est la meilleure du monde ou encore quelle est si ingénieusement construite qu’elle fonctionne aussi bien à l’eau qu’avec de l’essence… car des acheteurs potentiels ne peuvent raisonnablement se laisser méprendre par des arguments trop fantaisistes ou optimistes.

En revanche, il en ira autrement si vous portez, surtout en connaissance de cause, des indication erronées concernant des caractéristiques importantes du véhicule – des qualités substantielles pour reprendre l’expression de la Loi – c’est à dire celles qui sont susceptibles de déterminer véritablement le choix de l’acheteur.

A utiliser avec précaution !

Quelles sont donc, pour une automobile, les fausses indications les plus couramment sanctionnées par les Tribunaux ?

Pour l’essentiel, il s’agit de celles concernant le kilométrage, l’état général, l’historique et l’âge du véhicule.

Voici pour illustrer ces propos et vous aider à rédiger vos annonces, un petit catalogue (non exhaustif) d’expressions à manier avec circonspection et…honnêteté !

“première main”, cette expression implique que le véhicule a été principalement manipulé par un seul conducteur, et non pas, comme beaucoup le pense, qu’il n’a eu qu’un seul propriétaire ou une seule immatriculation (Cass. crim 22 décembre 1986, JCP Ed. G 1987, IV, p.74),

“moteur refait”, à éviter si vous vous êtes contenté de transposer la mécanique d’un véhicule accidenté, l’expression “moteur refait” ne pouvant être utilisée dans le cas d’un moteur de récupération (cass.crim, 20 octobre 1986, n°85-93.158),

“sans corrosion” si la rouille est présente et a fortiori si des “manques” de tôlerie ont été comblés avec des matériaux destinés, à l’origine, aux planches à voile….,

“kilométrage certifié” ou “garanti”, vous devez être en mesure d’en justifier, notamment par la chronologie cohérente du carnet d’entretien ou des factures successives (cass.crim 13 décembre 1993, n°92-86.277),

“Jamais accidenté”, doit être pris au pied de la lettre même si la réparation a été parfaitement exécutée, car l’absence d’antécédents accidentels constitue, selon les Tribunaux, une qualité substantielle pour une automobile (Cass. crim 27 janvier 1987, D.88 p.156 – cass. crim. 4 janvier 1986, D.1986, I.R p.401), étant précisé que ce qui est visé, ce n’est pas tant l’existence de petits accrochages de carrosserie que la dissimulation à l’acheteur d’un accident grave ayant fait subir au véhicule des avaries à ses organes vitaux.

Sachez également que certains termes ou expressions ont une définition réglementaire très précise.

En voici quelques-uns :

moteur ou organe “échange standard” : cette mention ne peut être utilisée pour désigner, en vue de la vente, un moteur, un organe ou un sous-ensemble monté ou destiné à être monté sur un véhicule automobile, en remplacement d’un élément usagé qui fait l’objet d’une remise que si le moteur, l’organe ou le sous-ensemble livré, identique ou équivalent, est neuf ou a été remis en état conformément aux spécifications du fabricant, soit par celui-ci, soit dans un atelier dont les moyens de production et de contrôle permettent de garantir les caractéristiques d’origine (article 4 du Décret n°78-993 du 4 octobre 1978).

“année modèle” : tout véhicule automobile conforme à l’un des modèles dont le constructeur a fixé les caractéristiques pour une année déterminée est désigné par le millésime de ladite année. Le millésime de l’année modèle change le 1er juillet, pour les véhicules immatriculés postérieurement à cette date (décret n°78-993 du 4 octobre 1978, arrêté du 2 mai 1979),

“date de première mise en circulation” : c’est la date de première immatriculation d’un véhicule neuf, c’est-à-dire la date de délivrance du premier certificat d’immatriculation, dans l’une des séries existantes, à l’exception toutefois des séries W et WW qui sont expressément exclues, ce en raison de leur nature essentiellement temporaire (art.2.3 de l’arrêté du 5 novembre 1984 relatif à l’immatriculation des véhicules – JO 22 décembre 1984 ).

En bref, soyez précis dans les renseignements que vous donnez et assurez vous que vous êtes en mesure de les justifier !

Maître Fanny MILOVANOVITCH Avocat à la Cour Barreau de Paris 26, avenue Kléber 75116 PARIS | Tel : 07 63 72 10 12 | Mentions légales